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Sécurité et sûreté

Refonder le service public de la police

Ce livret a été rédigé par un groupe de travail coordonné par François Thuillier, chercheur associé au centre d’études sur les conflits, et Marion Beauvalet, doctorante en théorie des organisations, avec la participation d’Ugo Bernalicis, député, membre du groupe la France insoumise.

Sommaire

Notre constat : l’affolement sécuritaire est inefficace et liberticide

2 500 blessé·es dont 353 à la tête, 30 éborgné·es, la mort de Zineb Redouane à cause d’une grenade lacrymogène lors de l’acte 3 des Gilets jaunes, une politique répressive brutale et légitimée par l’exécutif, la loi sécurité globale ou encore l’inscription dans la durée de l’état d’urgence : voici un extrait des résultats des politiques de sécurité d’Emmanuel Macron. Ajoutez l’accueil défaillant dans les commissariats qui rend difficile le dépôt de plainte ou l’accompagnement des victimes, l’omniprésence de la police sur le terrain pour contrôler les attestations liées à l’épidémie de Covid-19, un nombre élevé de féminicides, les demandes d’associations féministes restées sans réponse : voilà la description d’un service public en crise, détruit par des années d’austérité, de politiques du chiffre et de surenchère. 

Les mouvements sociaux ont été durement réprimés avec le déploiement de stratégies de maintien de l’ordre, déjà expérimentées dans les quartiers populaires. Celles-ci s’apparentent à la guerre par la contre-insurrection : équipement quasi-militaire, usage intensif des LBD 40, arrestations préventives, déploiement d’un arsenal législatif exceptionnel, images et discours chocs pour dissuader les manifestant·es. 

Les gouvernements successifs ont organisé le démantèlement des missions de service public de la Police nationale, pour n’en faire qu’un outil brutal et répressif. Dans la dernière « loi pour une sécurité globale préservant les libertés », nous avons assisté à une remise en cause profonde du rôle de l’État dans les politiques de sûreté : abandon au privé, surveillance de masse et délestage de missions sur les polices municipales. Ces choix politiques produisent une inégalité d’accès aux services de police. Or, la France est une République indivisible : la loi ne peut être appliquée « à la carte » en fonction des désidérata de chacun.

Le fumeux « continuum de sécurité » donne davantage de place aux sociétés de sécurité privées et ouvre de grandes opportunités de profits pour le secteur. Cette mise en concurrence généralisée s’observe également au sein de la Police nationale. L’application du New Public Management, transposant dans le public le fonctionnement du privé, s’est faite à coup de restructurations et de politiques du chiffre. Chaque service ayant des obligations de résultats, une injonction à la rentabilité s’est installée, et ce, peu importe le sens de la mission. Elle s’applique même aux relations entre les fonctionnaires de police : déconnexion entre donneurs d’ordre et exécutant·es, primes aux résultats, lettres de félicitations ou d’avertissement, système annuel de notation ou encore surcharge administrative sont autant d’éléments du management néolibéral qui influencent les stratégies policières et participent à la déshumanisation de la profession. 

Cette approche comptable et technocratique entretient cette crise systémique au sein de la police. La défiance s’installe dans le pays à l’égard de la police, et surtout du gouvernement qui la commande. Pour flatter les organisations policières, et faire tenir l’édifice répressif, Castaner rédige un livre blanc de la sécurité censé répondre aux grands enjeux de ce service public. L’échec est patent. Suite au scandale de l’affaire Zecler et les violences policières illégales couvertes par la hiérarchie, alors que l’encre du livre blanc n’est pas encore sèche, une nouvelle mystification est lancée à grand renfort de communication avec le ministre Darmanin à la manœuvre : le Beauvau de la sécurité. La feuille de route pour l’après-2022 en macronie est tracée : une succession de propositions sécuritaires réchauffées pour satisfaire les organisations policières les plus virulentes, et une opinion publique chauffée à blanc par des médias réactionnaires.

Leur politique ne marche pas. Elle n’a pas seulement des conséquences sur la qualité du service public ; elle est aussi à l’origine de risques psychosociaux pour les agent·es de gendarmerie et de police nationales : ces dernier·es se suicident 2,5 fois plus que le reste de la population. Les policier·es sont pris en étau entre d’une part un cadre organisationnel délétère et d’autre part une exacerbation des tensions sociales sur fond d’accroissement des inégalités. La politique du chiffre, la clochardisation des infrastructures, la surcharge administrative et les rythmes de travail déstructurants pour les familles, la déconnexion entre les hiérarchies et les agent·es de terrain, mais aussi entre les agent·es et leur lieu d’intervention sont autant de facteurs organisationnels qui fragilisent les fonctionnaires de police. Une situation délicate dans laquelle leur action est encadrée par une doctrine du maintien de l’ordre inadaptée, où les citoyen·nes sont davantage considéré·es comme des ennemi·es et où la coercition est privilégiée à la prévention. 

Pendant ce temps, les trafics continuent d’avoir pignon sur rue. Celles et ceux qui commettent des infractions sont de plus en plus sanctionné·es par la justice sans que cela n’ait véritablement de sens, comme l’atteste le taux de récidive pour les sortant·es de prison. La consommation de stupéfiants est en augmentation. La délinquance économique et financière, de la fraude fiscale aux arnaques sur internet, est en pleine explosion. 

Les nombreuses affaires de corruption et de fraude fiscale montrent à quel point l’argent pourrit tout. La collusion entre les mondes politique et financier est flagrante : après le scandale des « Panama Papers », le scandale des « Pandora Papers » en octobre 2021. Des milliers de personnalités politiques, 35 chefs d’État, des monarques, des éminences religieuses ou des milliardaires sont publiquement reconnus comme ayant pris part à la plus grande affaire d’évasion fiscale de l’humanité. La fraude financière est devenue une banale modalité de profit dans le capitalisme mondialisé. Cette délinquance produit son lot de victimes : le financement de nos services publics et les lanceur·ses d’alertes qui la dénoncent et la combattent.

La police judiciaire est en crise. Manque d’agent·es volontaires pour se former et pour assurer des procédures dans des enquêtes d’envergure et charge de travail colossale expliquent en partie le désamour pour l’investigation. Et pourtant, impossible de démanteler les réseaux et trafics sans enquêteur·ices et magistrat·es en nombre suffisant. Alors, les flagrants délits avec les Brigades anti-criminalité (BAC) sont devenus l’activité principale de la police pour fournir régulièrement des « bons » chiffres aux ministres successifs. On harcèle la délinquance la plus visible quand les autres peuvent dormir tranquille.

Le retour à la raison est plus que jamais nécessaire.

Notre projet : Refonder les activités de police de la cave au grenier

La sûreté, droit « naturel et imprescriptible », inscrit à l’article 2 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, est le principe fondamental qui guide notre conception du service public que sont les différentes missions de police. La sûreté, par-delà la notion de sécurité, garantit de ne pas être poursuivi arbitrairement par la puissance publique. Elle est consubstantielle à l’état de droit et à la séparation des pouvoirs. 

Contrairement au poncif de la droite réactionnaire qui proclame que « la sécurité est la première des libertés », nous affirmons que « la liberté est la première des sécurités » ! Ce n’est pas la police qui fait la loi, c’est le Parlement. Ce n’est pas la police qui rend la justice, ce sont les tribunaux. Révolutionner la police passe d’abord par remettre au centre la sûreté des citoyen·nes.

Nous refonderons la politique de sécurité publique sur la base du triptyque « prévention, dissuasion, sanction ». Nous réaffirmerons son caractère national et l’ouvrirons à l’implication citoyenne ; c’est-à-dire garantir et montrer à la population que les tâches de police se font dans l’intérêt général. Faire la sécurité citoyenne, c’est permettre une relation sereine et républicaine entre la population et sa police.

Notre objectif est de remettre sur pied une réelle police de proximité qui soit le socle de l’activité policière, à l’image du peuple et gardienne de l’application de la loi, sans distinction de classe, de religion, d’opinion, de quartier, etc. À l’inverse de l’idée de « police de projection et de réaction », nous proposons celle d’une police en interaction avec les citoyen·nes. Pour y parvenir, la police et les citoyen·nes doivent intégrer une compréhension commune des enjeux sécuritaires auxquels fait face la population pour parvenir à construire des outils de contrôle social positifs et préventifs. Les BAC et leur doctrine brutale de harcèlement n’ont pas leur place dans un tel dispositif. Elles seront démantelées en faveur de la police de proximité.

Le rôle social de la police de proximité participe de l’établissement de la légitimité de l’action policière sur un territoire, d’une efficacité plus accrue des services offerts et d’une amélioration conséquente de la qualité des conditions de travail des policier·es ainsi que de la qualité de vie des citoyen·nes. Abattre le mur de la méfiance réciproque entre police et population ne peut qu’améliorer le rapport qu’entretiennent les policier·es avec leur profession (contre le stress, la dépression, le sentiment de rejet des citoyen·nes) et le quotidien de la population (créer un sentiment de sécurité, de confiance et de contrôle envers les agent·es).

En ce qui concerne le maintien de l’ordre, nous marquerons une rupture avec ce vocabulaire autoritaire. L’objectif n’est pas tant de maintenir l’ordre – et quel ordre ? – que de permettre l’exercice de la liberté d’expression et de manifestation. Nous ferons du principe de désescalade le point cardinal de notre doctrine pour la gestion des foules et des manifestations revendicatives ou récréatives.

Nous renforcerons drastiquement la police judiciaire pour avoir une véritable filière d’investigation respectueuse des droits et libertés, sous le contrôle des magistrats et remontant jusqu’aux têtes des réseaux et trafics. Par ailleurs, nous légaliserons la production, la distribution et la consommation de cannabis sous le contrôle de l’État. Aujourd’hui la lutte contre le trafic de cannabis, et surtout la consommation, accapare environ 30% de l’activité policière, et il en est de même de l’activité judiciaire en matière pénale, sans faire baisser ni la consommation, ni le trafic. Nous refonderons l’échelle des peines pour que la prison, inutile pour faire baisser la délinquance, ne soit plus la peine de référence. Les peines de probation, qui permettent une meilleure sortie de la délinquance, seront la priorité en matière de sanction pénale.

Aucune police ne peut être respectée si elle n’est pas respectable. Il est nécessaire qu’elle soit contrôlée pour être légitime et donc avoir de l’autorité. Le contrôle de la déontologie en interne par l’Inspection générale de la Police nationale (IGPN) et par l’Inspection générale de la Gendarmerie nationale (IGGN) sera supprimé pour confier la mission à une autorité indépendante rattachée au Défenseur des droits, assurant un contrôle externe indépendant, avec les moyens nécessaires. Nous n’hésiterons pas à expurger la police et la gendarmerie de toutes celles et tous ceux qui ne respecteront pas la déontologie et la loi, notamment en matière de discriminations racistes et sexistes. Nous voulons une police républicaine, sous le contrôle du peuple et dans le respect des règles communes.

La sécurité civile est également une mission importante coordonnée par le ministère de l’Intérieur. Nous nous assurerons que le personnel concerné soit en nombre suffisant sur tout le territoire national, notamment en ce qui concerne les pompiers dont le nombre de professionnel·les est trop faible par rapport au nombre de bénévoles. Nous devons tenir les objectifs de santé publique mais aussi de prévention des risques en lien avec la planification écologique.

Enfin, il n’est pas de politique de sûreté et de police républicaine sans politique générale pour aboutir à la sécurité sociale. La sécurité sociale est, et restera, la meilleure politique de prévention.

Nos propositions : une police au service du peuple

Une Police nationale de proximité au service de la population

Intégrer la police municipale à la nationale et démanteler les Brigades anti-criminalité (BAC)

Cette conception de la police permet d’enrichir le travail des agent·es et de renforcer son lien avec la population, en l’orientant vers des missions de tranquillité publique. Nous voulons des « gardiens de la paix », pas des « forces de l’ordre ».

Nous intégrerons la police municipale à la police de proximité après une formation de quelques mois. Les communes continueront d’avoir à leur charge les agent·es de surveillance de la voie publique (ASVP) et les gardes champêtres.

La police de proximité sera donc organisée selon les principes suivants

  • Sous l’autorité fonctionnelle du maire pour organiser l’activité quotidienne, et sous l’autorité hiérarchique du préfet pour la gestion de la carrière, de la paye, des mutations, etc.
  • Les objectifs politiques seront fixés par les comités locaux de sécurité et de prévention de la délinquance (CLSPD) qui verront leurs moyens renforcés. Ils bénéficieront régulièrement d’un diagnostic local de sécurité pris en charge par l’État
  • Les policier·es seront affecté·es à des aires géographiques à taille humaine. Les policier·es connaîtront mieux leur secteur d’intervention et les habitant·es, et les habitant·es connaîtront et côtoieront les mêmes policier·es. Nous passerons des conventions avec les bailleurs afin de leur faciliter l’accès à un hébergement proche de leur affectation
  • Les policier·es de proximité auront pour objectif la tranquillité publique et utiliseront tous les outils de désescalade à leur disposition. Discuter avec les commerçant·es ou à la sortie des écoles sera encouragé. L’essentiel des effectifs n’aura plus d’arme létale à terme, et les techniques dangereuses de pliage, de plaquage ventral et de clé d’étranglement seront interdites
  • Le contrôle citoyen sera renforcé en permettant la présence de tout·e habitant·e qui le souhaite à au moins une réunion annuelle du CLSPD. Les policier·es de proximité affecté·es au secteur seront tout·es présent·es lors de cette réunion, ainsi que les services de la préfecture, du parquet, et tous les autres partenaires publics et privés habituels

La Police nationale de proximité sera composée de 40 000 femmes et hommes portant l’uniforme. La Direction centrale de la sécurité publique sera transformée en Direction centrale de la police de proximité. Pour ce faire nous allons :

  • Démanteler les BAC : environ 7 000 agent·es (5 000 en région, 2 000 à la préfecture de police de Paris)
  • Intégrer les polices municipales à la police nationale : environ 24 000 policières et policiers municipaux
  • Redéployer des effectifs s’occupant actuellement de sécurité publique sur des missions de proximité : 10 000 agent·es

La police de proximité n’aura pas vocation à faire des enquêtes judiciaires, sauf pour les gardes champêtres, qui deviendront des gardes environnementaux : nous proposons d’en recruter sur tout le territoire et notamment en ville. Leurs prérogatives dans le domaine du Code de l’environnement doivent permettre de lutter efficacement pour la préservation de l’environnement et de la biodiversité, en lien avec l’autorité judiciaire. 

Technopolice, refuser la surveillance totale de nos villes et de nos vies

Lorsqu’une nouvelle technologie existe, il n’est pas forcément indispensable, nécessaire et souhaitable de l’utiliser, surtout si elle soulève des questions éthiques.

Depuis plusieurs années, nous observons une fuite en avant dans le développement des outils de surveillance. Les caméras s’installent chaque mois par dizaines à grand renfort de subventions publiques. 50% de l’enveloppe du Fonds interministériel de prévention de la délinquance (FIPD) y est consacré ; nous les remettrons au profit de véritables actions de prévention. Ces caméras coûtent cher, sont intrusives et inefficaces. La vidéosurveillance contribue à élucider seulement 1,13% des enquêtes, selon une étude commandée par la Gendarmerie, et n’a pas d’impact significatif sur les infractions constatées. Nous supprimerons les subventions de ces caméras inutiles et nous entamerons un plan de démantèlement de ces outils inefficaces. 

Mais les partisans de la « technopolice » vont encore plus loin : caméras-piétons, caméras embarquées, drônes, transmission des images en temps réel, utilisation d’algorithmes « intelligents », etc. Nous mettrons un terme à cette fuite en avant et nous reviendrons à des méthodes de police et d’investigation qui mettent le savoir-faire humain au cœur du dispositif, dans le respect de la vie privée des citoyen·nes.

Améliorer l’accueil 

L’accueil dans les locaux de police est un moment crucial. Un mauvais accueil, des policier·es mal formé·es et/ou débordé·es, c’est ajouter à une personne qui a vécu un traumatisme une souffrance supplémentaire et un sentiment d’injustice. La fonction d’accueil sera revalorisée, notamment en termes de rémunération et de carrière. Il en sera de même pour celles et ceux qui répondent aux appels du 17. Il ne sera plus possible d’avoir des jeunes recrues seules sur ces postes stratégiques. La situation au sein des locaux de police reste dramatique : 1 commissariat sur 4 est considéré comme vétuste. Locaux insalubres, risques d’effondrement, rats, infections respiratoires telles que la légionellose, passoires énergétiques sont le lot quotidien des agent·es. Face à cela, nous mettrons en place un plan de rénovation et de construction des locaux, en luttant en priorité contre la clochardisation des commissariats et l’abandon de certains territoires, et en alliant accueil digne, garantissant la confidentialité, et impératifs opérationnels. 

La lutte contre les violences faites aux femmes et aux enfants

Le gouvernement et les associations de défense des droits des femmes font état de 94 000 femmes violées chaque année. Parmi elles, 12% portent plainte et seulement 1 à 2% de ces plaintes donnent lieu à une condamnation des auteurs. 

Dans l’Hexagone, plus de 50 000 enfants et adolescent·es par an sont victimes de maltraitance, et un enfant meurt tous les cinq jours, tué par sa propre famille. 

La police joue un rôle crucial dans la répression de ces violences. Nous créerons des brigades dédiées aux violences sexistes. Nous renforcerons les moyens des brigades de protection de la famille compétentes pour les violences sur mineur·es. Un grand plan de formation continue spécifique aux violences sexistes et aux discriminations sera déployé sur le territoire pour 100% des effectifs de police et de gendarmerie sur 5 ans.

Par ailleurs, nous proposons de nous inspirer de la méthode de Philadelphie, qui permet de mieux traiter les plaintes d’agression sexuelle et aux autorités de regagner la confiance des plaignantes, dans laquelle sont mises en place les démarches suivantes :

  • Étude des interrogatoires et de l’éventuelle présence de présupposés sexistes dans les questions lors de ces derniers
  • Recensement des témoins
  • Réalisation d’un examen médico-légal

Lorsqu’une faille est détectée, la police est informée avec pour objectif d’améliorer les procédures. Nous proposons de tester cette méthode en partenariat avec des associations de défense des droits des femmes, en associant avocat·es, magistrat·es et policier·es, afin d’organiser un retour d’expérience sur certains dossiers pour que le pourcentage de plaintes qui donnent lieu à un procès augmente et que les agressions sexuelles ne restent plus, dans la grande majorité des cas, impunies.

Mieux lutter contre les discriminations : en finir avec le contrôle au faciès

Les contrôles d’identité ne servent pas à lutter contre la délinquance. 97% d’entre eux n’aboutissent à rien car ils relèvent du contrôle au faciès. Pour en finir avec ces contrôles abusifs et discriminatoires, nous proposons d’expérimenter deux dispositifs :

  • L’instauration d’un récépissé de contrôle d’identité qui permettra d’obliger les policier·es à motiver leur contrôle et de constituer un outil statistique 
  • Des zones sans contrôle d’identité en dehors d’un flagrant délit, comme c’était la règle avant l’inflation législative antiterroriste

Le racisme et les discriminations sont aussi très présents au sein de la police. Nous appliquerons des sanctions administratives pour chaque comportement inadéquat. C’est en étant exemplaire que nous pourrons motiver celles et ceux qui ne s’y verraient pas aujourd’hui à rejoindre demain la police et la gendarmerie. 

La prévention spécialisée, maillon essentiel pour éviter la délinquance

Le renforcement des politiques de prévention est indispensable et complémentaire aux missions des policier·es et gendarmes, car elles permettent d’éviter les mises en danger sociales, économiques, scolaires ou urbaines. Elles ont pour premier objectif de bloquer à la racine les parcours délinquants. La prévention suppose de renforcer les formations des professionnel·les, leur nombre et leur déploiement sur l’ensemble du territoire, à commencer par la multiplication des cellules de veille de mineur·es entre les différents acteurs. Elle se base sur une démarche bienveillante et sur l’accueil généraliste et spécialisé des adolescent·es, en lien avec leur âge et leur maturité, en portant une attention particulière aux ressorts liés à l’entrée en trafic. Nous proposons :

  • Un plan de recrutement d’éducateur·ices spécialisé·es et d’éducateur·ices de rue dans les clubs de prévention, en lien avec les conseils départementaux
  • D’affirmer la prise en charge inconditionnelle et le secret professionnel garantissant la relation de confiance avec l’éducateur·ice
  • D’assurer la coordination entre acteurs de la prévention et police dans le respect des prérogatives de chacun
  • D’assurer le lien avec la protection judiciaire de la jeunesse et le service pénitentiaire d’insertion et de probation

Réorganiser le recrutement, la formation et la gestion des effectifs de police et de gendarmerie

Nous réhausserons la formation initiale à deux ans pour la police et pour la gendarmerie. Après une pré-affectation, la deuxième année sera une spécialisation en lien direct avec le premier poste. Nous multiplierons par deux le nombre d’écoles de police. Les universités seront associées à la formation : sociologues, psychologues, criminologues, juristes, tous ont leur place pour sortir du vase clos. La lutte contre les discriminations et les stéréotypes sera enseignée. La formation à la procédure judiciaire et au respect du cadre légal sera renforcée. Chaque élève fera une immersion dans un tribunal, en détention, en club de prévention, ainsi qu’auprès de personnels accompagnant la sortie de la délinquance. Nous réaffirmerons le rôle social du policier ou de la policière et le haut niveau de qualification que la société attend d’elle ou de lui. La formation continue sera renforcée dans ses moyens et dans sa fréquence. 

Le management à la performance sera aboli. Fini la politique du chiffre ! L’activité policière continuera d’être quantifiée à des fins statistiques, mais nous supprimerons les primes liées à celle-ci, car elles sont le cœur de ce système pervers qui fait perdre le sens du métier et retire aux policier·es leur capacité de discernement.

Nous doublerons les moyens consacrés à la prévention des suicides dans la police et la gendarmerie. Celles et ceux qui portaient l’uniforme et qui ont mis fin à leurs jours seront honorés lors de la journée annuelle de commémoration. Nous lancerons un plan de recrutement de psychologues au sein du ministère : les policier·es et gendarmes sont confrontés à des situations régulières de tension, de conflit et aussi à la mort, ils doivent pouvoir en parler librement avec du personnel formé pour cela. 

Afin de donner aux services les moyens humains de fonctionner nous proposons : 

  • La stabilisation des effectifs d’active au niveau actuel, et un plan de paiement des heures supplémentaires dûes
  • La création de 2500 postes d’agent·es administratif·ves pour libérer des tâches administratives les policier·es et gendarmes aptes à aller sur le terrain 
  • La création d’un greffe de police pour seconder la police judiciaire et sécuriser la procédure avec le recrutement et la formation de 1500 agent·es
  • La création de 3300 postes pour la police technique et scientifique
  • La suppression du statut précaire des 11 000 policier·es adjoint·es en permettant la formation et la titularisation
  • La diminution du nombre d’agent·es de la police aux frontières par la fermeture progressive des centres de rétention administrative

Pour rapprocher le peuple et sa police, une part du service citoyen obligatoire sera consacrée aux tâches de police. Les jeunes pourront plus tard, si ils ou elles le souhaitent, intégrer la réserve opérationnelle de la police qui sera essentiellement orientée vers les missions de proximité.

Nous proposons d’amorcer le travail afin d’unifier les forces de police et de gendarmerie dans un même corps constitué afin de refonder la sûreté de proximité et garantir une égale sécurité des biens et des personnes. Il s’agit de créer une « garde républicaine citoyenne » afin de mettre en commun les différentes missions de la police dans un même corps (de proximité, judiciaire, aux frontières, mobile, d’intervention, de renseignement, etc.). Ce corps sera unifié par un même statut de la fonction publique civile.

Certaines unités de la gendarmerie seront maintenues avec la militarité : protection et défense des institutions de l’État et des sites sensibles ainsi que les missions de prévôté (missions de police auprès des armées à l’étranger). 

Ces lois sécuritaires et liberticides que nous allons abroger

Nous abrogerons l’essentiel des lois suivantes :

  • Loi « sécurité intérieure et lutte contre le terrorisme » (2018)
  • Loi « renforcer et garantir le maintien de l’ordre public lors des manifestations » (2019)
  • Loi « sécurité globale » (2021)
  • Loi « prévention d’actes de terrorisme et renseignement » (2021)
  • Loi « responsabilité pénale et sécurité intérieure » (2021)

Pour une police judiciaire respectueuse de la procédure et des droits, sous le contrôle des magistrat·es 

La police judiciaire est en grande souffrance. Elle manque de moyens humains et de candidat·es pour la rejoindre.

Pourtant, elle est la garante d’enquêtes approfondies pour démanteler les différents trafics. En s’attaquant aux réseaux par la tête, nous augmentons la lutte contre la corruption et la délinquance de masse.

Nous voulons davantage d’effectifs pour renforcer notamment :

  • La lutte contre les violences intra-familiales, notamment sur les enfants
  • La lutte contre les féminicides et les violences sexuelles et sexistes
  • La lutte contre la traite des êtres humains et le trafic d’armes
  • La lutte contre la délinquance économique et financière

Aujourd’hui, beaucoup de policier·es et de gendarmes qui ont suivi la formation d’officier·e de police judiciaire ne sont plus sur un poste d’investigation. L’enquête est dévalorisée au profit d’unités d’intervention comme les BAC.

Il faut recréer deux univers distincts : d’un côté la police en tenue, celle de la tranquillité publique et de la proximité, de l’autre la police en civil, celle de l’investigation et de la sûreté. Ainsi il y aura une séparation des pouvoirs entre ce qui vient du pouvoir exécutif, et ce qui vient de l’autorité judiciaire. Nous remettrons en place un recrutement dédié pour intégrer la filière d’investigation avec les corps d’enquêteur·ices et d’inspecteur·ices de police.

La police judiciaire sera progressivement rattachée à l’autorité judiciaire en cohérence avec ce que nous proposons pour réformer l’institution judiciaire. Pour cela, nous allons :

  • Augmenter les effectifs de la police judiciaire de 6000 agent·es
  • Transférer progressivement les effectifs de la police judiciaire à la magistrature, en commençant par les offices centraux, sur le modèle des services à compétence nationale avec un magistrat en détachement en direction comme le SEJF (Service des enquêtes judiciaires des finances)
  • Simplifier le travail d’enquête en créant un greffe de police
  • Transformer en statut actif la police technique et scientifique pour que les agent·es puissent bénéficier des avantages de leurs collègues policier·es et des moyens de protection adéquats sur le terrain.
  • Créer des habilitations judiciaires spécifiques sur le modèle des officier·es fiscaux judiciaires et des douanes judiciaires pour d’autres catégories de fonctionnaires qui peuvent concourir à des enquêtes, en matière de fraudes à l’URSSAF ou d’atteintes à la biodiversité

Drogues, mettons fin à l’hypocrisie et à la répression des consommateurs !

Malgré une politique de prohibition, la France est le premier pays consommateur de cannabis en Europe, avec 900 000 usager·es quotidien·nes. Cette politique répressive est un échec total, que ce soit en termes de santé publique ou de résorption des trafics. C’est pourquoi nous proposons la légalisation de la production, de la vente et de la consommation du cannabis sous le contrôle de l’État, que ce soit pour un usage thérapeutique ou récréatif. 
Les bénéfices de cette légalisation seront multiples :

  • Le financement de campagnes massives de santé publique et la diminution de consommations à risques
  • Des rentrées fiscales pour les caisses de l’État
  • Le contrôle de la qualité des produits consommés 
  • L’économie d’environ 30% du temps de travail d’agent·es sur l’activité pénale côté police et justice
  • La création d’emplois légaux dans la filière, de la production à la vente

Notre politique concernant les stupéfiants en général visera la réduction des consommations à risques, sans pour autant en banaliser l’usage. Nous mettrons en place sur tout le territoire des salles de consommation à moindre risque comme lieu d’accueil et de contact des usager·es. Il s’agit d’une action politique dont l’impulsion doit être nationale et qui implique les municipalités qui sont chargées de la médiation dans et à proximité des salles de consommation. Nous étudierons les résultats de la stratégie entreprise par le Portugal, qui a choisi de dépénaliser l’usage – et non pas le trafic – de l’ensemble des drogues. Le ministère de la santé sera responsable des politiques publiques relatives aux stupéfiants et mettra en place une politique de santé publique ambitieuse. Quant aux policier·es, leurs missions seront réorientées afin de lutter plus efficacement contre les trafics illégaux et les réseaux criminels.

On reprend l’argent de la délinquance économique et financière !

La criminalité financière domine le crime, elle en est souvent l’ultime finalité. La première exigence face à ce mastodonte est la volonté politique.

Cette lutte doit être une cause nationale et s’appuyer sur la coopération renforcée entre le ministère des Finances, le ministère de la Justice et le ministère de l’Intérieur pour permettre des opérations de contrôle global. Cela passera par : 

  • Le contrôle des mouvements de capitaux pour renforcer la lutte contre les trafics financiers
  • Le doublement des effectifs de police affectés à la lutte contre la délinquance financière et économique en lien avec le fisc, les douanes et la justice financière (dont les effectifs du parquet national financier, en plus d’un renfort drastique côté cabinets d’instruction)
  • Le renforcement et la restructuration des douanes, en réaffirmant des missions de contrôle des importations pour lutter contre les trafics de marchandises, d’armes, de drogues et d’êtres humains

Enfin, le parquet doit pouvoir engager des poursuites sur les affaires fiscales, comme en toute autre matière. Ainsi, la suppression du monopole partiel du déclenchement de poursuites judiciaires par l’administration fiscale en cas de fraude (connu sous le nom de « verrou de Bercy ») permettra à la justice d’enquêter. 

Garantir le droit de manifester

« Frapper un manifestant tombé à terre, c’est se frapper soi-même en apparaissant sous un jour qui atteint toute la fonction policière » écrivait le préfet Grimaud en 1968. Face au constat d’usage disproportionné de la force, la doctrine de désescalade est un choix politique fondé sur le discernement et la connaissance des comportements en manifestation. Elle s’inscrit dans la volonté de réhabiliter la doctrine française du maintien de l’ordre fondée sur le triptyque : mise à distance des manifestants, intervention collective et sur ordre, et emploi graduel et réversible de la force. Avocat·es, observateur·ices, journalistes, procureur·es, toutes et tous auront leur place en manifestation pour s’assurer du respect des libertés fondamentales. Nous renouerons avec les programmes de recherche internationaux sur la gestion des foules et l’emploi de la force publique.

  • La désescalade s’obtient en amont et pendant une manifestation avec l’instauration d’un dialogue entre les organisateurs d’une manifestation et la préfecture
  • Le déploiement de la force doit être graduel et proportionnel : certaines techniques comme l’usage de la nasse, les armes mutilantes comme les LBD 40 et diverses grenades seront interdites. L’usage de gaz lacrymogène doit être réduit 
  • Les personnes sur le terrain doivent être spécialement formées et entraînées. Les BRAV-M seront dissoutes. Seuls les agent·es du renseignement territorial clairement identifié·es pourront être en civil dans les cortèges

Délimiter strictement le champ de la sécurité privée

Sous l’impulsion de concepts tels que le « continuum de sécurité » et le « cœur de métier » pour les fonctionnaires de police et les militaires de la gendarmerie, ce quinquennat aura été celui de l’extension du domaine de la sécurité privée. Nous remettrons des fonctionnaires à la place des agent·es privé·es chargé·es du gardiennage de services publics, notamment pour les préfectures ou les tribunaux. 

Nous remettrons en place la taxe spécifique dans le secteur, comme le demande la Fédération française de la sécurité privée, pour la flécher intégralement en direction du Conseil national des activités privées de sécurité (CNAPS). Il y aura les moyens d’un contrôle effectif du secteur notamment pour les agent·es de sécurité privée qui sont souvent employé·es dans des conditions non réglementaires, sans les formations adéquates et dans une précarité notoire en dépit du code du travail.

Contre le terrorisme, retrouver la voie de la raison

Le ministère de l’Intérieur doit cesser d’être le ministère de la peur irrationnelle et devenir celui de la paix civile. La « guerre contre le terrorisme » suivie depuis quelques années n’aura eu pour effet que de fragiliser notre cohésion nationale et nous aligner sur l’agenda diplomatique étasunien.

Nous souhaitons :

  • Refuser la logique du choc des civilisations et de la « guerre intérieure » et sortir des guerres déstabilisatrices et des alliances hypocrites avec les pétromonarchies du Golfe
  • Mettre en œuvre une stratégie globale de lutte contre le terrorisme « hors limites » au moyen d’une coalition universelle sous l’égide de l’ONU et ciblant les composantes économiques (blanchiment d’argent, ressources pétrolières, approvisionnement en ligne)
  • Sortir de l’Otan pour instaurer l’indépendance de la France et refuser d’être à la remorque des États-Unis d’Amérique

La deuxième tâche est l’amélioration de la prévention et la lutte raisonnée contre l’embrigadement par :

  • La prévention, en assumant le rôle central de l’éducation, de la sécurité sociale, des services publics de proximité et des mécanismes socio-économiques et psychiques. Elle nécessite de revenir sur l’autonomisation de l’enjeu sécuritaire dans le débat politique. Un travail interministériel de fond sur les actions face aux publics pouvant basculer dans les actes meurtriers est nécessaire. Un partenariat devra être engagé avec le monde académique, en particulier les sciences humaines et sociales, afin d’orienter de manière plus rationnelle l’action des services. 
  • Une stratégie politique globale pour renforcer les anticorps républicains et supprimer le terreau des communautarismes. En parallèle, le soutien aux démarches de signalement par les proches permettra l’intégration des personnes suspectées dans des programmes non judiciaires de prise en charge contre l’embrigadement
  • Le développement de peines de substitution à la prison pour les courtes peines. La prison est actuellement un lieu d’embrigadement et de constitution de réseaux et les peines de probation sont trop peu prononcées
  • La réflexion sur le rôle de la presse : la liberté d’informer ne doit pas exonérer les médias et journalistes de leur responsabilité dans le jeu médiatique des réseaux terroristes

Le troisième tâche repose sur des services de renseignement efficaces :

  • Renforcer le renseignement territorial et humain : nous reviendrons sur la fusion de la DST et des RG. Cette réorientation de la spécialisation du renseignement permettra de privilégier l’infiltration, le travail de terrain et le redéploiement intelligent. À rebours de l’illusion du tout technologique, elle permettra de renforcer les moyens d’analyse des renseignements collectés. La diversification du renseignement permet d’assurer des approches complémentaires des informations et de garantir des contre-pouvoirs en recrutant des analystes et des traducteur·ices en nombre suffisant. Le retour d’une véritable communauté antiterroriste, plus large que l’actuel « premier cercle » des services de renseignement, et composée d’agences de taille et de légitimité égales, permettra d’apporter une réponse plus diversifiée à la menace que ce que permet aujourd’hui la seule culture policière de la DGSI
  • Entamer un plan de titularisation et de fidélisation des agent·es contractuel·les de la DGSI, notamment avec des formations initiales et continues de haut niveau de qualification
  • Remettre en question les pratiques et dispositifs inefficaces et liberticides de surveillance de masse sur l’Internet et les réseaux téléphoniques. Un contrôle accru des services sera exercé en renforçant les pouvoirs de la délégation parlementaire au renseignement (DPR) – avec la présence a minima d’un membre de chaque groupe politique au Parlement – et de la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement (CNCTR). De même, un circuit interne fonctionnel permettra à un·e lanceur·se d’alerte au sein des services de signaler des actions illégales ou attentatoires à notre souveraineté
  • Focaliser le renseignement sur les menaces sécuritaires et économiques hexagonales, en particulier la mouvance d’extrême droite et les groupuscules anti-républicains, et non sur la surveillance des mouvements sociaux
  • Restaurer l’indépendance nationale en matière de renseignement et défendre l’échange d’informations dans les discussions pour constituer une coalition universelle contre Daesh et ses avatars

Pour être efficace dans la durée, une politique antiterroriste rationnelle devra enfin tourner le dos aux logiques d’exception :

  • Abroger la loi « renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme » du 30 octobre 2017 qui a inscrit l’état d’urgence dans le droit commun. Nous abrogerons également les textes suivants qui ont approfondi cette logique
  • Judiciariser la lutte antiterroriste. Cela passe par une réduction du nombre dee mesures administratives sans suites judiciaires, l’accélération des procédures, la suppression de toute juridiction spécialisée et l’augmentation des moyens de la justice antiterroriste afin de garantir une lutte efficace, durable et respectueuse des droits et libertés fondamentaux
  • Supprimer les cours d’assises spécialement composées en matière de terrorisme pour remettre des jurés tirés au sort, et que la justice soit rendue au nom du peuple français comme en droit commun
  • Arrêter progressivement les opérations « Sentinelle » (type Vigipirate) et passer à une surveillance ciblée des lieux publics par les effectifs renforcés de la police, de la gendarmerie, de la garde nationale et non de l’armée

La sécurité routière

Notre programme va dans le sens d’un ralentissement de la vie notamment par la reprise en main par chacun du temps dont il dispose. Cela passe par la relocalisation de l’activité et par la diminution du temps de travail. Cela limite dès lors les phénomènes de course permanente contre la montre où la vitesse devient un élément de compétitivité collective et individuelle. Plus précisément, notre vision de la sécurité routière est basée sur l’éducation et la prévention dès l’école, dans le cadre d’un service citoyen par lequel le droit de conduire serait gratuit. Nous souhaitons : 

  • Expérimenter le bridage des véhicules pour qu’ils ne puissent plus dépasser des vitesses excessives et inclure l’éthylotest anti-démarrage dans tous les véhicules
  • Diminuer la présence de radars fixes hors des zones accidentogènes. Nous leur préférons les radars mobiles, en cohérence avec la présence des gendarmes et des policier·es
  • Financer les radars pédagogiques et les feux intelligents dans les villes pour fluidifier les axes urbains
  • Refuser la privatisation de la sécurité routière qui doit rester le monopole de la puissance publique

Réformer le contrôle de l’activité policière et gendarmesque et en finir avec les violences policières

Pour cela, nous défendons la refondation du code de déontologie des services de police :

  • Rétablir les missions de 1986 supprimées par Manuel Valls en 2014 pour y réintégrer la mission de « défense des Libertés et de la République »
  • Renforcer la formation initiale des agent·es tournée notamment vers l’éthique et la relation avec les concitoyen·nes

Les missions de contrôle de la déontologie en interne par l’IGPN et par l’IGGN seront supprimées. Cette mission de contrôle sera dévolue à une autorité indépendante rattachée au Défenseur des droits qui en a déjà actuellement la compétence. Son rôle sera modifié afin qu’il puisse directement prononcer des sanctions administratives avec un cadre procédural respectueux des plaignant·es et des droits de la défense.

Les enquêtes judiciaires concernant des faits de violence policière seront systématiquement dépaysées dans un autre parquet. Les services du Défenseur des droits seront associés aux enquêtes pénales en plus des services de police judiciaire compétents.

Sans attendre de réforme, notre futur ministre de l’Intérieur appliquera l’ensemble des demandes de sanction du Défenseur des droits. Une commission « Vérité et Justice » sera ouverte sur les violences policières passées ayant entraîné la mort ou des mutilations pour établir les responsabilités.

L’Inspection générale de l’administration récupérera le reste des missions de contrôle interne.

Pour une contribution active de la France à la recherche universitaire et internationale 

Nous souffrons d’un débat irrationnel sur la sécurité, les chiffres de la délinquance ou encore le sentiment d’insécurité. Les lois ne sont que très rarement évaluées.

C’est pourquoi nous avons besoin que la recherche, indépendante et scientifique, puisse avoir les moyens d’évaluer les politiques publiques de sécurité et de nourrir les perspectives de réforme. 

Nous recréerons l’Institut national des hautes études de la sécurité et de la justice (INHESJ) supprimé par Castaner. Nous modifierons son fonctionnement afin que le conseil scientifique soit pleinement compétent pour définir les axes de recherche. Bien sûr, le ministère de l’Intérieur pourra passer des commandes mais il ne fixera pas les priorités.

Nous proposons que l’INHESJ puisse fournir gratuitement aux communes des enquêtes de victimation pour qu’elles puissent définir leur stratégie locale de prévention de la délinquance. Nous relancerons la coopération internationale sous l’angle de la recherche universitaire et nous financerons massivement des postes de doctorant·es.

Conclusion

Le consentement à l’autorité et le recours de l’État à la force pour faire appliquer la loi reposent d’abord sur la légitimité des lois, des ordres et de ceux qui les appliquent. Le pays a besoin d’une loi juste et élaborée démocratiquement ; d’une police républicaine et d’une justice impartiale et véritablement rendue « au nom du peuple français » ; ainsi que de la fin des privilèges et des passe-droits. La politique témoigne de rapports de force entre des classes sociales aux intérêts divergents. Aux responsabilités, l’Union populaire redonnera le pouvoir au plus grand nombre : ses politiques seront celles de l’intérêt général et les politiques de sécurité ne constitueront pas une exception. En refondant en profondeur ce service public en crise, il sera possible de reconstruire la confiance abîmée entre la police et la population. Un lien abîmé par des années d’austérité, par des consignes qui font le choix de la répression et de l’escalade des tensions, par des imperfections légales qu’il convient de corriger, etc. 

S’attaquer à la petite délinquance, au crime organisé ou à la délinquance en col blanc nécessite d’en comprendre les différentes sources. Rien ne peut se penser sans faire appel à une refondation de l’École, à l’éradication de la misère et du chômage, à la réduction des inégalités socio-économiques, à la fin de l’impunité dont profitent les puissants, à l’accès égalitaire aux services publics ou encore à une généralisation de la sécurité sociale. Il nous faut mobiliser l’énergie des individus pour qu’ils se transforment eux-mêmes pour pouvoir ensuite transformer la société. Il n’y pas de République sans républicain·es. Et pas de souveraineté du peuple sans citoyen·nes pleinement souverain·es. Ce ressort individuel de la souveraineté s’appelle la vertu civique. C’est la force personnelle qui permet à chacun·e de dépasser son intérêt particulier pour comprendre l’intérêt général. Cette vertu est impossible à développer dans un système où règne l’oligarchie. L’arbitraire des puissants comme les privilèges de l’argent sapent toute vertu républicaine dans l’ensemble du corps social. On ne pourra donc faire vivre une société sûre sans éliminer l’oligarchie, et ses méfaits qui devront devenir la priorité d’une nouvelle politique pénale, de la conduite des affaires publiques. La vertu républicaine étant impensable dans une société capitaliste où l’argent corrompt tout, l’oligarchie utilise l’appareil sécuritaire non seulement pour garantir l’ordre mais pour réprimer toute velléité de changement. L’oligarchie retourne ainsi l’État contre le peuple voulant exercer ses droits. La surenchère sécuritaire est toujours le signe que la société a échoué à régler un problème humain, social, éducatif et sanitaire. Pour nous, la société française ne souffre pas d’abord d’un manque d’autorité mais d’un manque d’égalité.