Tous les sites

Face à l’extrême droite, reconstruire un service public de l’enseignement supérieur et la recherche ouvert, indépendant et solidaire 

Face à l’extrême droite, reconstruire un service public de l’enseignement supérieur et la recherche ouvert, indépendant et solidaire 

Depuis sa réélection, Donald Trump a mis en place de nombreuses mesures répressives contre la recherche scientifique et les universités. Celles-ci sont accusées d’être un foyer des idéologies de gauche, résumées par l’acronyme DEI (diversité – équité – inclusion) brandi comme un épouvantail, à l’instar des critiques en France contre le prétendu « wokisme ».

La communauté scientifique française a témoigné sa solidarité avec le monde universitaire étasunien, notamment à travers l’initiative « Stand up for science ». Cependant, elle a accueilli avec consternation les déclarations d’Emmanuel Macron et François Hollande, prétendant que l’université française était en capacité d’accueillir des centaines de chercheurs étatsuniens, alors qu’ils ont eux-mêmes coupé massivement les budgets et précarisé la totalité du personnel actuel.

Comment croire que l’enseignement supérieur et la recherche en France, sous-financés depuis plus de vingt ans et ayant récemment subi un nouveau budget d’austérité, soient capables d’accueillir dans de bonnes conditions un nombre important de chercheurs étrangers ? À l’inverse, la précarité galopante a déjà poussé de nombreux jeunes chercheurs et chercheuses français·es sans poste à s’installer à l’étranger. Beaucoup se trouvent contraints de changer de voie, une immense perte pour le pays alors que les besoins pour relever les défis de notre siècle sont immenses.

Au lieu d’essayer d’attirer par opportunisme quelques « stars » supposées de la recherche américaine, renforçons drastiquement les dispositifs déjà existants, notamment le « programme PAUSE » qui favorise l’accueil de scientifiques et des artistes en exil. Car à rebours des grands discours, celui-ci a précisément été réduit de 60 % par les politiques d’austérité menées par Macron — seulement 70 chercheurs et artistes seront accueillis en 2025 contre 170 en 2024. L’inconséquence se double aussi de l’hypocrisie des indignations sélectives. Les mêmes qui tentent de s’acheter à peu de frais une image d’opposants à Trump sont restés silencieux face aux attaques de Milei contre les universités publiques argentines, ou lorsque Netanyahu a fait détruire l’intégralité des universités de Gaza.

Il reste vrai qu’il faut à tout prix tirer les leçons de l’expérience trumpiste. La solution ne se trouve certainement pas dans l’accélération de la transformation néolibérale du modèle universitaire français et sa convergence avec le modèle étasunien, dont la fragilité est aujourd’hui manifeste. Les libertés académiques ne flottent pas dans l’éther, elles s’ancrent matériellement dans des institutions qui peuvent les protéger : en premier lieu, là où Trump peut licencier à l’envi les employés fédéraux, c’est bien le statut de fonctionnaire qui se révèle être un rempart pour les libertés académiques.

En second lieu, le modèle français de financement de la recherche apparaît aujourd’hui fragile : le choix d’une part toujours plus importante de financement par projets de la recherche est dangereux dans la mesure où les critères d’attribution sont par nature susceptibles d’être influencés par le pouvoir politique. De même, la logique de contractualisation entre les universités et l’État, notamment à travers les Contrats d’objectifs, de moyens et de performances (COMP), que le Ministère souhaite voir devenir le moyen exclusif de l’allocation du budget récurrent des universités, introduit une « punition budgétaire » systématique pour les dépenses de fonctionnement. Cette approche renforce la tutelle politique sur les établissements, ce qui va à l’encontre de l’autonomie théorique des institutions publiques.

Loin du modèle dangereux promu par la macronie, la solution réside dans un nouveau calcul, transparent et équitable, des dotations de base entre les établissements.

Parmi les réponses et remparts les plus essentiels face à l’extrême droite partout dans le monde, nous défendons un modèle universitaire et de recherche public, ouvert, solidement financé par des fonds publics, garantissant l’indépendance, tourné vers les défis du futur et résolument internationaliste et accueillant. C’est ce modèle que nous reconstruirons lorsque nous serons au pouvoir.

À court terme, d’où qu’ils viennent, les chercheurs et chercheuses, ainsi que le personnel des universités et des organismes de recherche, ont avant tout besoin de véritables postes, en nombre suffisant, et d’un environnement d’enseignement et de recherche propice.

Enfin, si la France a été une terre d’asile politique et social pendant de nombreuses années, c’est en grande partie grâce à la garantie de la liberté d’expression et à l’existence d’un modèle social solidaire. Plus que jamais, ce modèle et ces valeurs de solidarité doivent être défendus.

Partagez
Facebook
Twitter
WhatsApp
Telegram
LinkedIn