La Nuit du Bien Commun est un fonds de dotation qui organise des galas caritatifs produits par des sociétés appartenant au milliardaire d’extrême droite Pierre-Édouard Stérin. Loin d’être une initiative philanthropique neutre, il s’agit d’un outil politique assumé de propagande réactionnaire.
Il a initié le projet Périclès (pour « patriotes enracinés résistants identitaires chrétiens libéraux européens souverainistes ») dont l’objectif affiché est de dépenser des dizaines de millions d’euros pour imposer les thèmes et les idées fascistes, décrédibiliser les idées de gauche, faire gagner l’extrême droite conservatrice aux prochaines élections.
Si le projet se présente comme apolitique, les associations ainsi que les donneur·euses sont issu·es de la sphère très conservatrice, notamment de l’Institut Iliade qui vise la défense de la « race blanche » contre le « grand remplacement ». Certaines associations, sous couvert de défense des femmes, ont comme mission principale de les dissuader d’avoir recours à l’avortement.
Parmi les associations mises en avant, certaines revendiquent « l’autonomie, l’intégration et le lien social » pour les personnes handicapées dans une vision de charité chrétienne. C’est le cas de l’école privée hors contrat Jacinthe & François qui promeut « un enseignement s’appuyant sur la foi catholique et l’intelligence de l’enfant ».
Cette approche révèle une conception profondément problématique du handicap dans notre société. La charité envers les personnes handicapées se fait « par le haut », à partir de l’idée que ces personnes auraient nécessairement besoin d’être sauvées, réparées ou libérées de leur handicap par la bonne volonté des valides. Le regard porté sur elle est dégradant : la personne handicapée n’est pas considérée comme une égale, mais comme un objet de soin ou de compassion. Deux options seulement semblent possibles : la plaindre ou la corriger.
Autre illustration emblématique de cette vision caritative du handicap, celle du Téléthon, organisé chaque année au début du mois de décembre. Cet événement repose sur une mise en scène médiatique de la souffrance, principalement celle d’enfants handicapé·es, afin de susciter l’émotion et la pitié du public pour récolter des dons.
Si le financement de la recherche médicale est évidemment nécessaire et légitime, nous affirmons qu’il devrait relever d’un engagement public pérenne, et non dépendre de campagnes fondées sur l’affect et la culpabilisation. Faire reposer la recherche sur la pitié revient à entretenir une représentation misérabiliste du handicap et à dépolitiser des enjeux qui relèvent pourtant pleinement de la responsabilité collective et de l’action publique.
Cette représentation est un obstacle majeur à toute réflexion politique émancipatrice. Elle empêche de penser une solidarité concrète, fondée sur des droits effectifs, des politiques publiques ambitieuses et l’accessibilité universelle. Elle détourne le regard des véritables enjeux : l’égalité, l’autonomie réelle, la justice sociale et la reconnaissance pleine et entière des personnes handicapées comme citoyen·nes à part entière.

