« Rien à branler d’être un violeur » déclare l’influenceur Paffman, dans une vidéo publiée sur Tiktok, revendiquant des relations sexuelles non-consenties avec sa partenaire. Il est visé par une enquête pour apologie de viol.
En juillet dernier, un projet d’attentat masculiniste a été déjoué à Saint-Etienne. C’est la première fois en France que le Parquet national antiterroriste est saisi pour une attaque masculiniste.
Derrière l’arrestation de cet homme de 18 ans ou les vidéos de Paffman, se cache une idéologie incel d’extrême droite qui se développe sur les réseaux sociaux à l’encontre des droits des femmes. Plus globalement, ces actualités doivent nous questionner sur la misogynie en ligne et les violences sexistes et sexuelles à l’ère du numérique.
Skinny tok, clean girl, tradwife : quand l’extrême droite dicte les normes de genre
Sur les réseaux sociaux, de nombreuses « tendances » mettent en avant des standards de beauté fascisants. Tous ont en commun une norme esthétique de femme blanche, mince, consacrée à son foyer et en contrôle absolu de son corps. Elles s’inscrivent dans un rejet de la liberté des femmes et un écrasement uniforme de leur diversité.
Parmi elles, la tendance skinny tok pousse à la maigreur extrême et encourage des troubles du comportement alimentaire (TCA). La tendance clean girl prône la sobriété, la discrétion et la pureté avec un objectif d’optimisation de soi individualiste : une esthétique épurée, des tenues neutres et sans défauts, une pratique quotidienne du sport et du développement personnel, une peau sans imperfections grâce à une routine skin care quotidienne, des cheveux lisses, etc. La tendance tradwife (« épouse traditionnelle ») promeut quant à elle une certaine vision de la famille, considérant que les femmes mariées doivent être femme au foyer, dédiées à leur mariage, leur famille et leurs enfants. Leur place n’est pas à l’extérieur, dans l’espace public ou le monde du travail, mais au foyer, consacrées aux tâches ménagères.
Ces tendances conservatrices poursuivent également une logique consumériste. Elles font ainsi prospérer une industrie capitaliste qui développe un marketing genré adapté à ces normes imposées et marchandise le bien-être. Mais en réalité, ces tendances véhiculent des idéaux qui résonnent avec des discours conservateurs : elles valorisent l’ordre, la retenue et le retour à des valeurs traditionnelles au détriment des droits des femmes.
L’essor du masculinisme en ligne
Le masculinisme est un mouvement d’extrême droite de haine des femmes et des féministes, déplorant une prétendue crise de la masculinité et faisant l’apologie du patriarcat et de la puissance physique. Les masculinistes fustigent les femmes ayant connu plusieurs partenaires sexuels. Parmi eux, les incels (« célibataires involontaires ») rendent les femmes responsables de leur célibat et légitiment les violences à leur égard. De nombreux influenceurs émergent sur les réseaux sociaux pour diffuser ces idéologies, notamment des coachs en séduction ou en développement personnel et des créateurs de contenus tels que le britannique Andrew Tate ou le français Alex Hitchens. Mais si ces idéologies se développent en ligne, elles puisent leurs discours dans une misogynie omniprésente dans la société.
Le rapport 2024 du HCE sur l’état du sexisme en France révèle que le masculinisme gagne du terrain : 37 % des hommes (+ 3 points) considèrent que le féminisme menace la place et le rôle des hommes et 32 % (+ 3 points) que ces derniers sont en train de perdre leur pouvoir. Ce phénomène concerne toutes les générations mais les jeunes hommes sont de plus en plus nombreux à considérer qu’il est difficile d’être un homme dans la société actuelle (39 et 40 % pour les 15‑24 et 25‑34 ans), que l’on s’acharne sur les hommes (52 % des 25-34 ans) et qu’il n’est plus possible de séduire une femme sans être vu comme sexiste (59 % des 25-34 ans).
C’est conceptions alimentent partout dans le monde un terrorisme masculiniste meurtrier : attaque à la voiture bélier d’Alek Minassian à Toronto (2018), fusillade de Plymouth par l’incel Jake Davison (2021), etc. En France, plusieurs attaques contre les femmes ont été commises ou déjouées ces derniers mois. Par exemple, en mai 2024, Alex G. est interpellé à Bordeaux après avoir posté une vidéo en hommage à Elliot Rodger, auteur d’un massacre en Californie (Isla Vista). Il prévoyait de commettre un attentat lors du passage de la flamme olympique à Bordeaux.
Misogynoire : la double peine
La haine contre les femmes sur les réseaux sociaux s’exprime également à travers les cyberviolences sexistes et sexuelles : harcèlement, deepfake (enregistrement vidéo modifié), envois ou publications de photos non consenties, etc. Les femmes racisées sont surexposées aux violences sexistes et sexuelles, et cela concerne également ces violences en ligne. En août 2024, le mouvement #AntiHSM a éclaté sur les réseaux sociaux pour dénoncer le cyberharcèlement sexiste et raciste et la misogynoir. Sur twitter/X, des milliers de femmes ont pris la parole pour témoigner des violences qu’elles subissent, en particulier l’hypersexualisation, le doxxing, le revenge porn, etc. Ainsi, selon l’association Féministes contre le cyberharcèlement, 84 % victimes de cyberharcèlement sont des femmes. En outre, parmi elles, 58 % sont racisées et subissent des formes de harcèlement spécifiques sur les réseaux sociaux.
Nos propositions
Face aux cyberviolences sexistes et sexuelles et au masculinisme, il est urgent d’agir. Nous proposons de :
- Réguler les usages du numérique : développer la sensibilisation aux addictions numériques (réseaux sociaux, contenus pornographiques, etc.), interdire la publicité alimentaire et réguler le sponsoring des podcasteur·ses ciblant les enfants et adolescents en ligne
- Refuser la censure privée sur les réseaux sociaux opérée par les GAFAM et doubler les moyens humains de la plateforme PHAROS en charge de la prévention et de la surveillance des violences sur Internet
- Allouer les 3 milliards d’euros de budget demandés par les associations féministes
- Créer un Haut-commissariat dédié à la lutte contre les violences sexistes et sexuelles. Il impulsera les mesures à prendre, aura des liens réguliers et privilégiés avec les associations féministes et qui luttent contre les violences faites aux femmes
- Mettre en œuvre effectivement la loi de 2001 sur l’éducation à la vie affective, relationnelle et sexuelle afin de favoriser l’apprentissage du consentement dès le plus jeune âge
Retrouvez nos autres mesures pour lutter contre le patriarcat et promouvoir une société féministe ici : https://programme.lafranceinsoumise.fr/livrets/egalite-femmes-hommes/

